Mon Top 30 des films de 2019

Mon Top 30 des films de 2019

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Les Misérables

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The Irishman

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mardi 3 décembre 2013

Tour du Monde #3 : Taïwan - A Brighter Summer Day, de Edward Yang (1991)


Dans le cadre de mon Tour du Monde cinéma.

Un film de Edward Yang (1991)
Avec Chang Chen, Lisa Yang, Elaine Jin

TAÏWAN
J'alterne les continents. J'ai commencé ce Tour du Monde avec l'Europe (Danemark) et je me suis par la suite rendu au Tchad, en Afrique. J'avais prévu à l'avance l'Asie comme étant ma troisième étape : un cinéma que j'aime beaucoup et qui, en plus, est très peu distribué en France (à l'exception du cinéma japonais et parfois coréen). Plutôt que de m'intéresser aux "grands" pays de ce continent, j'ai choisi Taïwan. Taïwan c'est une île au large de la Chine, dont le statut même de pays indépendant n'est pas reconnu par tout le monde (à commencer par la Chine). Pendant des siècles, ce petit bout de territoire passe entre les mains des Japonais ou des Chinois à tour de rôle. En 1945, à la fin de la guerre, la République de Chine la prend aux mains des japonais (cela contre l'avis des populations locales, puisqu'en raison des émeutes, 30.000 Taïwannais natifs seront tués). Lorsque les communistes prennent le pouvoir en Chine en 1949 (et qu'elle devient donc la République populaire de Chine), les nationalistes chinois qui étaient auparavant au pouvoir (les membres du Kuomintang), se réfugient sur Taïwan en conservant leur République de Chine, désormais réduite à la possession d'une seule île. Le Parti du Kuomintang imposera alors une loi martiale et Taïwan vivra pendant plusieurs décennies comme une dictature. En 1987, Chiang Ching-kuo lève la loi martiale en vigueur depuis 1949 et permet ainsi le début de la démocratisation de Taïwan. Ces mesures permettront à Chen Shui-bian d'être élu en 2000, premier président de la République de Chine n'appartenant pas au parti du Kuomintang.

Le cinéma taïwanais date du début du XXème siècle. D'abord fortement influencé par le cinéma japonais (puisqu'il en était une colonie), il devient un cinéma "de propagande" lorsque le Kuomintang arrive sur l'île en 1949, et se limitera à transmettre des "valeurs traditionnelles" jusqu'en 1982, la République de Chine ne permettant qu'à certains films préalablement approuvés de sortir en salles. En 1982, face à la concurrences des productions hongkongaises, le cinéma taïwanais cherche de nouveaux talents. Tentant d'abord de recopier la formule de ses voisins, des cinéastes comme Edward Yang ou Hou Hsiao-hsien vont finalement imposer un style ultra-réaliste au cinéma taïwanais, le posant comme une peinture de la vie sur l'île, tant dans ses environnements ruraux que urbains. En 1989, La Cité des douleurs de Hou Hsiao-hsien remporte le Lion d'Or à la Mostra de Venise, permettant à ces réalisateurs d'obtenir une renommée internationale. En 1990 arrive une seconde vague de réalisateurs taïwanais, dans un style différent de ses aînés, portée par Ang Lee, dont les énormes succès lui permettront de s'exporter aux Etats-Unis (Hulk, L'Odyssée de Pi, Brokeback Mountain et Hôtel Woodstock) mais aussi Tsai Ming-liang, dont le film Vive l'amour remportera lui aussi le Lion d'Or à Venis en 1994.

LE FILM
Edward Yang est l'un des cinéastes taïwanais les plus importants de sa génération, à la fois pour avoir porté presque tout seul le cinéma de son pays à une renommée internationale mais aussi pour l'influence qu'il a su avoir sur ses voisins chinois, notamment Jia Zangke. Dans A Brighter Summer Day, Edward Yang s'intéresse à l'histoire et la sociologie de son pays dans les années 1960. Fresque d'une jeunesse en quête d'identité, vivant sous la loi martiale et s'organisant en gangs, jeunesse perdue cherchant le sens de ce que leurs pères leur ont dicté. Oeuvre de près de 4h, film social sur font de romance et de peinture d'une époque, considéré à sa sortie comme un véritable chef d'oeuvre mais tombé dans un oubli quasi-total du fait de sa distribution chaotique en Occident (tout ce qu'on a du film est une VHS sous-titrée en mandarin et en anglais).


A Brighter Summer Day, pardonné l'expression, mais c'est un morceau de cinéma qu'il faut s'enfiler. Quatre heures dans une qualité médiocre sous-titré dans une langue qui n'est même pas la mienne... mieux vaut ne pas être fatigué, mieux vaut ne pas avoir peur de l'oeuvre de Yang. Pourtant le film est passionnant, interprété par une pléiade d'acteurs amateurs fascinants de réalisme, une mise en scène sobre mais aux couleurs, à la construction des plans absolument magistrale. On ne s'ennuie pas - même si j'avoue avoir fait une pause au milieu du film. L'ambiance et la reconstitution donnent une véritable claque, on se croirait dans les rues de Taipei au début des années 60. Et, passé la première heure, on a enfin conscience être devant un chef d'oeuvre. Un chef d'oeuvre qui prend son temps, au-delà de la définition basique du cinéma, qui se rapprocherait plus d'une grande peinture d'une époque et d'une jeunesse souffrante, jusqu'au final portant au tout une note terriblement noire mais magnifique et marquante.
A Brighter Summer Day est à la fois la représentation parfaite du cinéma taïwanais et de la situation de Taïwan. Les acteurs sont géniaux, Edward Yang tient sa caméra et filme le quotidien comme peu de ses confrères. Rythmé sur du Elvis (le titre est d'ailleurs extrait d'une chanson du King), aux couleurs chantantes d'un été mélancolique mais sombre.


Même si ces quatre heures ne sont pas sans passages plus lents, on reste admiratif devant la maîtrise visuelle, narrative et artistique du film d'Edward Yang, qui reste, au travers de sa courte mais impressionnante, un cinéaste qui aura su marquer son cinéma et son époque. A Brighter Summer Day est une oeuvre fascinante et parlante, portrait d'un pays dont l'histoire mouvementé n'est que trop peu connue.

1 commentaires:

  1. Vous pouvez utiliser ce site et y regarder des films gratuitement https://frenchstream.video/ Je l'ai aimé et je peux vous le recommander en toute sécurité.

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